Au dialogue de la réconciliation nationale ouvert hier au Cicad de Diamniadio, le Président Macky Sall a annoncé qu’il va saisir l’Assemblée nationale dès mercredi pour un projet de loi d’amnistie sur les faits découlant des manifestations politiques entre 2021 et 2024. Le Président Sall a aussi remis sur la table son souhait de voir le scrutin présidentiel se tenir avant le début de l’hivernage.
Par Alioune Badara NDIAYE – L’amnistie était dans l’air du temps, ces dernières semaines. Le Président Macky Sall l’a confirmé lundi en annonçant un projet de loi en ce sens lors de la réunion de demain du Conseil des ministres. Au nom de la stabilité et de l’unité nationale, le Président Macky Sall compte passer l’éponge sur les évènements de mars 2021 et juin 2023 ayant engendré des troubles graves avec respectivement l’arrestation de Ousmane Sonko dans l’affaire «Sweet beauté» et sa condamnation pour corruption de la jeunesse. Des évènements tragiques s’étant soldés par 13 morts, selon le bilan établi par les autorités pour 2021, et 29 selon un décompte d’Amnesty international pour ceux de juin 2023. A ceux-ci viennent se greffer plus récemment les 4 morts lors des manifestations contre le report de la Présidentielle du 25 février. Les faits découlant de toutes ces manifestations vont être amnistiés. Le chef de l’Etat l’a fait savoir dans son discours introductif au dialogue de réconciliation nationale, qui se déroule sur deux jours. «Notre pays se retrouve à un carrefour important. Mon souhait c’est que nous puissions aller vers une élection apaisée, inclusive et transparente. A cette fin, et dans un esprit de réconciliation nationale, je saisirai l’Assemblée nationale d’un projet de Loi d’Amnistie générale sur les faits se rapportant aux manifestations politiques survenues entre 2021 et 2024», a assuré le Président Sall. «Je souhaite, au-delà du souci légitime de justice et de redevabilité, que l’amnistie et le pardon, par leurs vertus salutaires pour la Nation, nous aident à surmonter ces moments difficiles, afin que notre cher pays se réconcilie avec lui-même, en remettant toutes ses forces vives autour de l’essentiel», a-t-il enchaîné. S’entend par l’essentiel, selon le propos du président de la République, la sauvegarde de notre unité nationale, toutes sensibilités confondues, et la préservation de l’Etat de Droit et de la République. «Cela permettra de pacifier l’espace politique, de raffermir davantage notre cohésion nationale et de maintenir le rayonnement démocratique de notre pays», a-t-il noté pour motiver sa décision conformément à son message du 3 février. Ce jour en effet, le Président Sall avait stoppé net le processus en abrogeant le décret convoquant le corps électoral le 25 février. Une décision qu’a finalement retoquée le Conseil constitutionnel le 15 février, tout en appelant les autorités compétentes à organiser le scrutin «dans les meilleurs délais». «Sans revenir sur les péripéties du report du scrutin présidentiel, je rappelle qu’en prenant acte de la décision du Conseil constitutionnel, qui s’inscrit dans le cadre des mécanismes normaux de la démocratie et de l’Etat de Droit, j’ai indiqué ma volonté de faire exécuter ladite décision pour que le scrutin soit tenu dans les meilleurs délais», a-t-il rappelé. Alors que des candidats en lice et des organisations de la Société civile revendiquent la tenue du scrutin avant le 2 avril correspondant à la fin du mandat en cours, leur requête n’est pas proche de se réaliser, à en juger le discours du président de la République. Pour lui en effet, l’élection devra se faire avec des garanties de transparence, crédibilité qui apparemment ne semblent pas encore réunies pour le chef de l’Etat.
«Tenir l’élection avant
l’hivernage, le gouvernement y travaille»
«En convoquant ce dialogue, qui n’est pas le premier du genre, je n’ai qu’un seul objectif : trouver un consensus sur la date de la prochaine élection présidentielle afin que le scrutin se tienne dans les meilleures conditions d’organisation et de transparence qui en garantissent la crédibilité», a-t-il noté. «Ma volonté et mon vœu le plus cher, c’est de faire tenir l’élection présidentielle dans les meilleurs délais et ceci avant l’hivernage prochain. Le gouvernement y travaille déjà pour une parfaite organisation logistique», a insisté Macky Sall. En amont au dialogue, le Président Sall a reçu deux des candidats en compétition, Mohammed Boun Dionne et Amadou Ba, en l’occurrence, et des candidats recalés. Les 17 autres candidats ont décliné l’invitation du président de la République. Pour Macky Sall, c’est autour de la table que le pays parviendra à s’extirper de ce moment de turbulence qu’il vit et qui arrive à tous les pays.
«Toutes les démocraties, même censées être les plus vieilles, ont leurs moments de fragilités, parfois ponctués de violence (…) Le dialogue et la concertation permettent justement de soigner ces fragilités et d’avancer dans la quête de l’idéal de démocratie», a-t-il indiqué, assurant que c’est par le dialogue que notre démocratie se renforcera. «Rero amoul niak wakhtan a am», a-t-il glissé et de poursuivre : «alors, dialoguons. Restons sereins, responsables, pragmatiques et efficaces. Chacun de nous doit se transcender et s’élever à la hauteur du Sénégal que nous voulons : un Sénégal de paix et de stabilité», a exhorté Macky Sall. Les restitutions du dialogue sont attendues aujourd’hui, jour de la clôture.
abndiaye@lequotidien.sn